DE LA JOUISSANCE A L’INCONSCIENT
De la jouissance à l’inconscient », sous l’apparence d’un énoncé simple s’ouvre un redoutable chantier. La préposition « à » en est sans doute le terme majeur puisqu’elle indique un passage, ou mieux un « déplacement ». Ce dernier terme est de Lacan et on le trouve dans cette phrase extraite de « Radiophonie » : « Faire passer la jouissance à l’inconscient, c’est-à-dire à la comptabilité, c’est en effet un sacré déplacement ( J. Lacan, « Radiophonie », dans Autres écrits, Paris ). Une précision préliminaire s’avère indispensable. Ce passage concerne le rêve et il faudra admettre, sans plus de tergiversation, que ce qui vaut pour le rêve vaut pour la structure. Quels sont les opérateurs constituants de ce déplacement, sachant que Lacan a volontairement traduit par « déplacement » le terme Entstellung qui est ordinairement traduit par « déformation » ?
À partir de là peuvent se repenser à nouveaux frais une poignée de questions :
– y a-t-il une jouissance primaire en deçà de la jouissance phallique ?
– le Nom-du-Père est-il un cas particulier du sinthome ou faut-il tenir ferme sur la disparité des deux catégories ?
– l’identification au symptôme peut-elle être incluse dans la série des trois identifications freudiennes ?
– qu’entend Lacan par « jouissance dévalorisée » ?
On saisit l’incidence des réponses ainsi sollicitées et sur les positions actuelles concernant le traitement de la psychose et, plus généralement, sur la direction de la cure.
Pierre Bruno, Sophie Duportail et Laure Thibaudeau. septembre 2012.
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1 texte dans la revue PSYCHANALYSE N° 26 . Interview avec Pierre Bruno, Sophie Duportail, Laure Thibaudeau.