Avril 2014
Séminaire le Mans: De la jouissance à la pulsion
Rappel
La jouissance est phallique. Quelque soit le mode d’assujettissement du sujet au langage (névrose, psychose ou perversion), la jouissance est jouissance du signifiant. Ce qui manque au psychotique, c’est la signification phallique. Sa jouissance est bien phallique. Il n’y a pas de jouissance première qui ne serait pas phallique.
L’année passée, nous avions vu que la jouissance pouvait, dans le meilleur des cas, trouver à s’orienter de l’objet a. Et l’objet a est ce que la pulsion va crocheter dans l’Autre.
Les pulsions partielles
Pour Lacan, les pulsions ne sont pas tout de suite pulsions partielles. Il y a une phase où elles sont d’abord passives. C’est un temps où le sujet est dans le champ de l’amour.
Elles deviennent « actives », c’est-à-dire partielle, c’est-à-dire de « vraies » pulsions quand l’objet a est pris à l’autre. C’est-à-dire quand le sujet quitte le champ de l’amour.
Lorsque le cri de l’enfant est interprété par l’Autre parental comme appel, naît alors les jeux de la demande. Ce qui appelle, ce n’est pas le sujet, c’est le moi réel. C’est l’Autre qui impute la demande au sujet. A ce moment là le sujet est parlé par l’Autre. Il est joui par l’Autre. C’est même de là qu’émerge le moi réel comme opposition au fait d’être joui.
Le moi réel, dont parle Freud, n’est pas l’organisme. «Le RealŔich est conçu d’abord comme supporté, non par l’organisme tout entier, mais par le système nerveux dans son ensemble en tant que… sa trame et ce qu’il reçoit : les stimuli … ce qui en règle la décharge. » (SXI p261).
Il n’y a pas de représentations liées aux stimuli. Le sujet n’a pas de corps. Il n’y a pas de savoir. Le moi réel « vibre », est excité par les stimuli puis il y a décharge, cris et gesticulations.
Le corps finalement n’arrivera que bien plus tard (stade du miroir). A ce moment là, le système nerveux n’étant pas fini, il n’y a pas possibilité de ressentir l’unité du corps par la proprioception. Ce sera par anticipation que le sujet s’appropriera son corps comme unifié par l’image dans le miroir. Le corps, le sujet le possède et il le conduit, comme il conduira une voiture.
C’est important car c’est en cela que le corps n’est pas l’image de l’organisme. L’agitation motrice et les cris du nourrisson sont une décharge. Dans le lien à l’Autre maternelle, des représentations psychiques vont s’intercaler entre le stimuli et la décharge. Ce réseau de représentations est bien sur un réseau signifiant. C’est là que le sujet à sa place : il apparaît du saut d’un signifiant à un autre. Le sujet n’est pas le moi réel.
Pourtant en prenant les choses ainsi, on pourrait vite arriver, avec ces histoires de stimuli, à penser que la pulsion s’étaye sur le besoin. Il faut préciser. Si c’est de l’expérience liée à ces moments de tension organique (la faim par exemple) que la pulsion se construira, ce n’est pas du besoin et de sa satisfaction qu’elle se constituera. C’est de ce que l’Autre permettra d’attraper de ce qui le concerne, de ce qui parle de lui comme sujet (l’Autre), dans les soins qu’il procure à l’enfant. Comme le dit Freud, l’objet importe peu dans la satisfaction de la pulsion. Et Lacan précise que ce que la libido va quêter chez l’Autre, c’est l’objet a. C’est-à-dire ce qui intéresse l’Autre vraiment dans les soins qu’il procure. Dire cela comme ceci, c’est dire que l’Autre est sujet. C’est bien ce que Lacan dit : la pulsion fait apparaître un nouveau sujet. On le retrouve dans le dire de certains psychotiques : « c’est lui qui voulait. Je lui ai donné ce qu’il voulait ». On peut dire que ses pulsions sont celles de l’Autre. Elles ne sont pas reconnues comme siennes.
C’est d’attraper cet objet a dans l’Autre que naît la pulsion en tant que partielle, en tant que véritable pulsion.
La pulsion est une force constante. Elle ne dépend pas des excitations qui parviennent au moi réel supporté par le système nerveux. Mais ces excitations qui provoqueront un besoin de décharge en passeront par les pulsions.
L’organisme n’est pas le réel du corps. C’est l’objet a, soit ce qui intéressait l’autre dans les soins donnés à l’enfant et qui sera représenté par les objets partiels (sein, fèces, regard et voix). Ce réel du corps est pris à l’Autre.
Des orifices corporels
Il y a cependant quelque chose d’autre. Il y a un autre réel que celui de l’objet a ou du moi réel. Il y a ce que Lacan dans la réponse à Marcel Ritter appelle le réel pulsionnel. « … il y a un réel pulsionnel uniquement pour autant que le réel c’est ce que dans la pulsion je réduis à la fonction du trou. C’est-à-dire ce qui fait que la pulsion est liée aux orifices corporels. » (lacan réponse ritter). Il précise : cela a à voir avec les bords du trou.
Au regard de ce que je viens de dire, qu’est-ce qui peut expliquer que la pulsion soit liée aux orifices corporels ? Est-il si évident que cela que le corps soit troué ? Qu’est-ce qui troue le corps qui n’est d’abord qu’image plane prise dans le miroir ?
Dans le moment de conclure, Lacan dit « « Il y a plus d’un trou chez ce que l’on appelle l’homme, c’en est même une véritable passoire : j’entre où ? » dit Lacan (S25 p 20). Pour continuer dans l’équivoque, il appellera les hommes « les trumains ». Il dit aussi que chaque trumain à une bouche voire un anus. La formulation de Lacan donne à penser que la présence d’un trou n’a rien d’évident sur le corps de l’être vivant. (il dit une bouche voire un anus). Cela pourrait être vrai aussi pour la bouche bien que l’objet voix qui passe par ce même orifice fait que la bouche n’est pas le trou du seul objet oral. Certains enfants naissent sans anus et il faut intervenir chirurgicalement pour faire ce trou. Là il est question d’organisme pas de corps mais l’image est claire. Qu’est-ce qui fait qu’un trou dans l’organisme sera trou dans le corps, c’est à dire trou pour la pulsion ? Et bien, c’est l’Autre. C’est dans les jeux de la demande et du désir avec l’Autre que le trouage se fait. On peut dire que c’est l’Autre qui troue le corps dans les soins portés à son enfant. C’est là que l’autre érotise le corps de l’enfant. C’est aussi dans ce lien que l’enfant peut ouvrir ou fermer le trou en ne voulant pas manger, en se refusant de faire dans le pot et/ou en faisant dans sa culotte ou encore en voulant pas voir ou en se bouchant les oreilles.
Un autre point important est que ces trous ne donnent pas sur l’intérieur du corps. Pour figurer le corps, Lacan prend un tore (une bouée), qu’il ouvre et qu’il retourne. Il appelle cet objet une trique. Il n’a pas choisi la sphère sur laquelle, comme sur un ballon, on peut faire des trous pour les yeux, la bouche, etc. « Le fait que l’être humain se définisse à peu près comme une trique, à savoir qu’il ait une bouche, voire un anus, et aussi quelque chose qui meuble l’intérieur de son corps, c’est quelque chose qui a des conséquences. » (Lacan S25 p22).
Images prises dans l’édition staferla du séminaire de Jacques Lacan
Une trique est un tore que l’on coupe puis retourne.
Sur cet objet (la trique) on voit bien le trou qui passe en son centre et l’intérieur de la trique qui se trouve autour du trou. Ce qui pourrait relever de l’organisme et dont la science nous en apprend de plus en plus, n’a pas à voir avec ce dont il est question au sujet des trous pulsionnels. La pulsion sort et entre par le même trou. Il n’est pas question là de l’objet qui peut entrer par la bouche, par exemple, et sortir par l’anus. Chaque trou a sa vie propre liée à la pulsion qui y est associée. On le voit bien dans les troubles hystériques qui affectent les fonctions corporelles associées à ces orifices.
Dans ce même séminaire (Le moment de conclure), Lacan a imagé « métaphoriquement ce dont il s’agit dans la doctrine de Freud ». Il présente une composition de trois couples :
- Pulsion/ inhibition
- Principe de plaisir/savoir inconscient
- Réel/fantasme.
Ces trois couples se nouent bien évidemment de façon borroméenne. Il n’y a là pas de corps si ce n’est peut être dans la question de l’inhibition et dans celle du fantasme. Mais il n’est pas nommé comme tel.
Le couple pulsion/inhibition suggère bien l’idée de la pulsion à poussée constante. Elle ne s’endort pas, n’a pas de rythme. Elle ne connaît pas d’hiver ni de printemps (Lacan). Elle ne peut être qu’inhibée.
Avec le couple principe de plaisir/inconscient, c’est l’inconscient comme savoir qui guide le sujet pour la baisse des tensions et donc sur les voies du plaisir. Cela est phallique car lié au représentations et cela est vrai autant pour l’homme que pour la femme.
Enfin, le dernier couple que Lacan désigne comme tiers élément est l’accouplement du réel et du fantasme. « C’est mettre l’accent sur le fait qu’il n’y a pas de réalité. La réalité n’est constituée que par le fantasme ». Le sujet ne voit le monde qu’à travers son fantasme qu’il s’est construit dans son rapport à l’Autre et duquel il a extrait l’objet a.
Voici donc la composition de Freud présentée par Lacan. De là Lacan s’étonne : « Ce qui me semble matériellement abusif, c’est d’avoir imputé tellement de matière au sexe».
La pulsion est acéphale
Un dernier petit point avant de passer à la sexualité humaine : la pulsion est acéphale.
Il n’y a pas de sujet de la pulsion, nous dit Lacan. Ça veut dire par exemple que la pulsion scopique se satisfait aussi bien dans le voyeurisme que dans l’exhibitionnisme du sujet. Or dans ces deux situations, le sujet n’est pas à la même place. Il y a voir et être vu. Que le sujet se positionne comme celui qui voit ou comme celui qui est vu n’a pas d’importance pour la pulsion. Elle est satisfaite.
De la sexualité humaine.
En reprenant Lacan, il y a quatre objets a (la voix, le regard, le sein et les fèces) qui définissent quatre pulsions. Il n’y a pas de pulsion génitale qui aurait à voir avec les organes génitaux. Il n’ y a pas de pulsion qui pousserait à copuler dans le but de se reproduire. Même si Freud est ambigu quand il dit que les pulsions partielles devront se regrouper sous le primat des zones génitales dans le but de la reproduction, Lacan précise qu’il n’y a que des pulsions partielles et que l’on ne trouve nulle part dans l’inconscient de trace d’une pulsion génitale. Le désir d’enfant et le désir sexuel sont distincts même si tout acte sexuel entre un homme et une femme peut conduire à une naissance comme chaque homme devrait en prendre la mesure en couchant avec une femme.
S’il y avait une pulsion génitale, il y aurait un objet a génital. Dans le séminaire sur l’angoisse, Lacan aborde un moment, l’objet a phallique. Il l’abandonnera ensuite. Le phallus n’entre pas dans la suite des objets partiels. C’est un signifiant. Il permettra l’équivalence des objets du désir comme le dit Freud (excréments, argent, pénis, enfant) mais il ne fait pas parti des objets a.
Regardons cela avec ce qu’en dit la jeune homosexuelle de Freud, Sidonie Csillag dont je vous ai entretenu la dernière fois.
Les organes génitaux masculin et féminin soulèvent chez elle de l’angoisse. L’acte sexuel est pour elle angoisse ou douleur d’être pénétrée. « Une opération sans narcose ne serait pas pire. » dit elle. Elle se demande comment font les femmes pour se soumettre à cela. Même le désir d’enfant n’est pas pour elle une raison suffisante.
Ne serait ce pas là que le phallus est aifié ? Que le pénis est objet a ? Et qui dit objet a, dit trou. N’est-ce pas de trouage dont il est question pour elle dans la rencontre sexuelle avec un homme ? Alors que dans l’acte sexuel le vagin se fait gaine, dans une étreinte, pour elle la pénétration est perçage.
A l’inverse, Sade qui recoud la mère lui disant qu’elle ne fera plus d’enfant ne tente t il pas de rabattre la question de l’acte sexuel au désir d’enfant ? Il phalicise l’objet a.
Tous deux dans une structure perverse différente essaient de s’accommoder de ce qu’implique l’acte sexuel là où le psychotique peut défaillir.
Une théorie de la baise
Pour mieux appréhender cela, il nous faut approcher ce qu’il en est d’une théorie de la baise comme la nomme Jean Allouch.
Dans son texte « hommage rendu par jacques Lacan à la femme castratrice », il pose les bases d’une théorie de la baise. Il s’appuie sur le séminaire de l’angoisse et sur les « propos directifs ».
Il y aborde la voie androcentrique, choisie par Lacan, de rencontrer la femme. Dans la rencontre du partenaire sexuel, ce qui est en jeu, c’est la jouissance phallique, que l’on soit homme ou femme. La jouissance sexuelle est phallique. Il s’agit d’y rencontrer l’Autre sexe dont la jouissance serait Autre et notée J(A) dans le nœud borroméen. Rencontrer l’Autre sexe, c’est rencontrer la femme dont il dira plus tard qu’elle n’existe pas. Que ce soit pour un homme ou pour une femme, dans l’union sexuelle il s’agit de la rencontre avec la femme et « l’homme sert ici de relais pour que la femme deviennent cet Autre pour elle-même, comme elle l’est pour lui. » (Ecrits p 732)
Comment l’homme sert-il de relais ? Lacan dit que « la sexualité féminine apparaît comme l’effort d’une jouissance enveloppée dans sa propre contiguïté (dont peut-être toute circoncision indique t elle la rupture symbolique) pour se réaliser à l’envi du désir que la castration libère chez le mâle en lui donnant son signifiant dans le phallus. » (Ecrits p 735)
C’est-à-dire que la femme s’appuie sur le désir de l’homme, sur le fait qu’il bande. Pas de sexualité féminine sans un homme qui bande. Elle se réalise en surenchérissant sur le désir mâle. (J Allouch p 8).
Il faut franchir un pas de plus et dépasser cette image d’Epinal de l’acte sexuel. L’allusion à la circoncision dans cette phrase, laisse entendre que cela ne concerne pas uniquement les femmes.
Pour tout sujet, dont la castration a libéré le désir, la sexualité apparaît comme une jouissance (phallique) enveloppée dans sa propre contiguïté pour se réaliser à l’envi de ce désir.
Si elle est enfermée dans sa propre contiguïté c’est que la jouissance sexuelle n’a pas de pulsion (qui serait génitale) comme l’a la jouissance orale par exemple. Elle va donc s’appuyer sur le désir du sujet (dont le phallus donnera l’équivalence des objets).
Mais « Le support du désir n’est pas fait pour l’union sexuelle ,car généralisé il ne me spécifie plus comme homme ou femme ,mais comme l’un et l’autre . » P 504 angoisse.
Car « le champ ouvert par l’homme et par la femme , dans ce qu’on pourrait appeler, au sens biblique , leur connaissance l’un de l’autre, ne se recoupe qu’en ceci :que la zone où ils pourraient effectivement se recouvrir , où leurs désirs les portent pour s’atteindre , se qualifie
par le manque de ce qui serait leur médium : le phallus . »
Le désir les amène à se rejoindre par le phallus.
« C’est ce qui, pour chacun, quand il est atteint, justement l’aliène de l’autre.
De l’homme , dans son désir de la toute puissance phallique ,la femme peut être assurément le symbole , mais c’est justement en tant qu’elle n’est plus la femme. Et quant à la femme , il est bien clair, par tout ce que nous avons découvert de ce que nous avons appelé Penisneid, qu’elle ne peut prendre le phallus que pour ce qu’il n’est pas, c’est à dire : soit petit(a) , l’objet , soit son trop petit ( φ ) à elle, qui ne lui donne qu’une jouissance approchée de ce qu’elle imagine de la jouissance de l’Autre, qu’elle peut sans doute partager par une sorte de fantasme mental, mais qu’à obérer sur sa propre jouissance. » Angoisse p 501
Voilà donc comment ils vont aller l’un vers l’autre.
Mais les jeux dans l’union sexuelle vont apporter une surprise.
Dans l’acte sexuel, il y a la jouissance préliminaire (celle qui fait monter les tensions) et l’orgasme (qui vient mettre fin à cette montée).
Cette montée des tensions provoquée par les jeux préliminaires à pour effet au sens freudien, de créer une pulsion qui va chercher conformément au principe de plaisir un abaissement de cette tension. Il s’agit plus d’une pseudo pulsion. Freud a déjà parlé d’une pseudo pulsion. C’était au sujet de la douleur. Une tension interne (non liée à un objet a, dirait Lacan) vient ainsi au psychisme.
Dans la construction de cette pseudo pulsion, il y a un pseudo objet a qui s’instaure. Comment comprendre ce pseudo objet a ?
La jouissance préliminaire est particulière car elle contrevient au principe de plaisir Freudien. C’est un plaisir qui se constitue de la montée des tensions. Pour répondre à cette énigme, Lacan va étudier ce qui met fin à cette montée des tensions : l’orgasme.
Il dit que l’orgasme se produit à l’endroit même où se produit l’angoisse. Il dit aussi que l’orgasme vient mettre fin à un chemin vers la douleur où finirait cette montée des tensions si rien ne venait arrêter tout cela.
L’orgasme masculin, lié à l’éjaculation, pourrait laisser croire que ce qui est en jeu n’est que biologique. Cependant la clinique nous montre bien que ce terme peut arriver bien trop tôt ou trop tard au regard de ce qui est attendu d’une union sexuelle imaginée satisfaisante. Et que cela est du à un mécanisme psychique.
Au sujet de l’orgasme féminin, Lacan s’appuie sur un texte de Ferenczy, pour en faire une crise d’hystérie vaginale. Il s’agit de jouissance phallique. Si jouissance féminine il y a, ce n’est pas dans l’orgasme proprement dit.
Dans les deux cas, l’orgasme va se produire à un moment où « cela » doit s’arrêter. Pour certains cela arrivera vite. Pour d’autre cela n’arrivera même pas …. laissant alors la place à la douleur. Et cela autant pour les hommes que pour les femmes. Ce qui peut faire se requestionner sur la frigidité.
Alors que la tension monte, l’existence d’une pulsion génitale va se présenter comme de plus en plus crédible. Alors que le fantasme permettait de faire fonctionner jusque là une jouissance pulsionnelle classique ou partielle (avec les quatre objet a), de laisser au désir son rôle leurrant, le fantasme se trouve ébranler par cette jouissance sans pulsion. Cette jouissance ne pouvant être traitée par les pulsions partielles, semble promettre d’atteindre une jouissance telle que se pourrait être la jouissance première interdite à qui parle comme tel. Il y aurait rapport sexuel. Alors que le phallus semblait régler cette rencontre, il y échoue. La tension monte toujours. La faille qui existe entre désir et jouissance se présente. C’est l’angoisse. L’objet a se présente.
C’est là où le sujet suivant son fantasme ou suivant ce qui pourrait être une sexuation de son désir pour reprendre l’expression de Jean Allouch, va se trouver confronter à l’angoisse ou à la douleur. Angoisse face à une jouissance qui bien qu’impossible est dite par le fantasme interdite et donc provoquant angoisse de castration. Ou bien douleur car l’avènement d’un nouvel objet a convoquerait la nécessité d’un trou que le corps n’a pas. Il faut là préciser, comme le dit Lacan, que le vagin, dans l’acte sexuel se fait gaine. Il n’est pas trou.
A orienter ainsi les choses vers la douleur ou l’angoisse, vous voyez vers quoi je veux m’orienter : vers ce que soulève cette idée de deux perversions dont je vous avais entretenues.
Le fantasme est structuré sur un mode pervers. Ce qui est une autre façon de dire ce que Freud disait, que la névrose était le négatif de la perversion. S’il y a deux perversion, ne pourrait il pas y avoir deux fantasmes : un masculin et un féminin ? C’est-à-dire qu’il y aurait une sexuation du désir, différentes de la sexuation du sujet (cf formule de la sexuation du sujet qui parlent de comment le sujet se positionne au regard des jouissances). Cette sexuation du désir toucherait à la position du sujet dans son rapport à la jouissance phallique. Ce qui aurait des conséquences quant à son rapport à la jouissance féminine c’est-à-dire dans sa façon de faire avec l’objet de la jouissance féminine qui n’a pourtant pas d’objet.
Dans une intervention que Laure Thibaudeau était venue faire au Mans sur l’adolescence, elle nous disait qu’à cette période de sa vie, le sujet doit se positionner comme homme ou comme femme (son rapport à la jouissance) qui aime un homme ou une femme comme un homme ou une femme aime un homme ou une femme. Imaginez toute les combinaisons que cela donne. Un sujet peut être un homme qui aime une femme comme une femme aimerait une femme ou comme une femme aimerait un homme, ou etc ……
Avec le fantasme qui sera le sien, un sujet percevra l’objet a qui s’est dévoilé de sous le phallus d’une façon ou d’une autre suivant son fantasme.
Résumons un peu les choses. Le désir conduit des sujets à l’acte sexuel (pas la nature). Dans les préliminaires le désir va vers sa satisfaction à travers les jeux préliminaires impliquant les pulsions partielles. Puis la jouissance sexuelle prend de l’ampleur, la tension monte. L’absence de pulsion génitale qui pourrait résoudre cette tension pousse à l’existence d’une pulsion qui aurait pour objet a le pénis.
Si l’homme, par son fantasme pouvait se croire encore phallus, c’est à dire instrument de la jouissance de l’Autre, il se retrouve objet de la jouissance de l’autre. C’est l’angoisse. L’orgasme vient y mettre fin.
Pour la femme, l’orgasme arrive pour mettre fin à une angoisse face à la douleur que promet l’objet a en place de phallus.
Voici donc comment les choses peuvent s’appréhender avec encore beaucoup de précisions à apporter. On voit que la jouissance phallique trouve dans les pulsions une voie pour être traiter. La jouissance sexuelle soulève une difficulté. S’il y a des pulsions sexuelles, il n’y a pas de pulsion génitale.
La pulsion est liée au corps par les orifices corporels dont l’objet est pris à l’Autre. La pulsion est traitement de la jouissance phallique par un corps d’où cette jouissance est pourtant exclue. La jouissance est hors corps. Toute pulsion partielle est pulsion de mort nous dit Lacan. La vie pourtant se maintient. Où le vivant se loge t il ? Lorsque le premier réel émerge, c’est face au symbolique. L’imaginaire vient se nouer avec les deux autres intercalant entre eux le corps. La pulsion vient faire un pont entre la jouissance phallique et le corps. Si la jouissance phallique nait du recouvrement du réel et du symbolique, il y a au recouvrement du réel et de l’imaginaire une autre jouissance, elle hors langage. Hors langage, elle fera énigme mais par le fantasme elle sera interpréter comme jouissance de l’Autre. Alors qu’elle correspond à celle de l’Autre de l’Autre. Le fantasme, pervers, recouvre l’une par l’Autre. Au recouvrement du symbolique et de l’imaginaire, il y aura la jouissance du sens. Exclue du réel.
Cette Autre jouissance est liée à l’amour inconditionnel alors que la jouissance phallique est liée à l’amour conditionnel de l’Autre, soit son désir. Alors que le second s’appuie sur l’objet a, le premier reconnaît le moi réel. Le fantasme, pervers, dénie cette jouissance sans objet. Cependant cela ne lui enlève pas son effet (être vivant) même s’il lui en rajoute (angoisse, das ding, etc). Voici la pulsion de vie.
